[font=Georgia][i]Eilis s’était éveillée assez tôt pour voir une dernière fois le soleil se lever sur la lande écossaise. Assise en silence sur un coin de son lit, elle regardait les premiers rayons de l’aurore percer l’horizon. Elle n’avait jamais vraiment quitter les Highlands depuis son enfance même s’ils avaient déménagé, elle avait toujours pu voir ces prairies verdoyantes courir sous ses fenêtres, sans doute une des dernières images qu’elle emportait avec elle ce matin là. Depuis quelques jours déjà, une valise à demi ouverte trainait sur le sol, se remplissant de quelques vêtements jetés au hasard et de livres racontant les périples de créatures légendaires ou de héros fous ou peut-être simplement géniaux cherchant à réinventer le monde,c’était juste de quoi rêver un peu pendant les quelques heures de voyage qui la séparaient encore de sa nouvelle résidence.
Elle avait choisis de ne pas vraiment en parler avec ces parents, elle changeait simplement d’université pour suivre de meilleurs cours, elle ne revenait pas avant longtemps mais elle écrirait. Ce genre de promesses qu’on se fait en sachant, par avance, qu’on ne les tiendra qu’à moitié. Comme d’habitude, elle parla peu, fit un rapide sourire et lança en léger aurevoir avant de s’enfoncer dans le village. Elle avait relu plusieurs fois l’étrange courrier, mais jamais elle n’avait pu déceler le mystère de ces quelques lignes qui lui indiquaient seulement un ancien arrêt de bus près du vieux cimetière. Pour une fois, elle était décidé à suivre un chemin incertain puisque son instinct lui-même se rangeait de ce côté.
Tandis qu’elle marchait vers son seul indice, elle songeait à ses parents et à ce « don » qui lui était apparu par chance pour elle, par malédiction pour bien des gens. La différence … Elle déchirait déjà les humains entre eux alors il en serait de même pour ceux de son espèce. D’ailleurs autrefois, on considérait les créatures comme de simples monstres qu’on mettait dans des vitrines alignés comme de vulgaires trophées pour attirer les foules et montrer ce que le monde pouvait générer de plus horrible. C’était à ce demander où se trouvait le monstre… Aujourd’hui nous sommes devenu les méchantes créatures des films d’horreur, animaux mutants avec un besoin vital de sang humain. Eilis était devenue un Frankenstein moderne, la bête à éliminer, la brebis galleuse du troupeau. D’ailleurs, elle ne doutait pas un instant de devenir un véritable sujet d’expérience si qui que ce soit découvrait sa véritable nature et elle ne tenait pas à devenir le cobaye d’expériences tordues de savant à moitié cinglé. C’était en partie ce qui la poussait à se rendre devant cet arrêt et à attendre ce bus qui l’emmenerait dans cet endroit aussi étrange qu’incroyable.
Lorsqu’elle fut devant l’écriteau, elle n’eut pas le temps de déposer sa valise qu’un bus jaune pâle arrivait du bout de la rue. Il était ponctuel. La porte s’ouvrit et respirant une dernière fois l’air salé de l’Ecosse, Eilis s’engouffra dans l’autobus à demi vide. Elle s’installa au premier rang, espérant ainsi éviter les autres occupants du bus. Le chauffeur la dévisagea un instant et eut un sourire qui tordait son visage en une sorte de grimace abominable. Eilis tourna la tête vers son petit village une dernière fois et elle plongea sa main dans sa poche où elle laissa ses doigts se refermer sur un petit coquillage qu’elle avait toujours gardé. Elle le teniat de sa grand-mère qui lui avait dit qu’il venait de Parthénopé elle-même. C’était un peu comme une sorte de porte bonheur…
Peu à peu l’étrange véhicule quitta les landes pour passé dans une sorte de tunnel inconnu et sombre. Le chauffeur lança un vague « attention ça va secouer » avant que tout le bus se retrouve comme aspiré dans ce noir pour finalement attérir devant un autre arrêt qui surplombait la mer. Le temps était maussade, tissé de nuages gris qui ternisaient le paysage, lui donnant des airs de plateau désert. Eilis fut la première à descendre, se postant près de ce mystérieux arrêt, valise à la main. Les autres occupants du bus semblaient être habitués à l’endroit et ils se mirent à suivre un petit chemin qui traversait une grande forêt de chênes et de sapins. Elle les regardait s’éloigner, eux qui tout comme elle ressemblait en tout point à de simples humains. Pouvaient-ils eux aussi cacher le secret de leur apparence ?
Ce fut avec cette question qu’elle se décida à s’enfoncer à son tour dans la forêt. Elle marchait avec lenteur, simplement parc e qu’elle ne tenait pas à se fondre dans cette masse bruyante d’élèves. Elle voulait découvrir ce nouvel environnement et pouvoir le connaitre par cœur puisqu’elle allait y vivre durant une année entière. Elle s’éloigna peu à peu du chemin, marchant valise en main sur des parterres de feuilles et de branches qui craquelaient malgré son pas assuré et léger. Elle avait toujours aimé parcourir les endroits secrets que la nature préservait comme de véritables havres de paix. Elle y trouvait le silence et la tranquilité nécessaire à consitituer sa solitude. Pourtant cette fois le silence n’était pas aussi serein qu’elle l’espérait. Quelqu’un d’autre se trouvait là. Eilis s’arrêta pour se tourner vers un arbre d’où semblait venir cette présence étrange. Elle fixait l'endroit, parfaitement immobile, attendant que l'ombre se montre d'elle même.[i]
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