Nous montâmes sur le toit. C'était étrange en quelque sorte que de savoir que "mon" refuge était aussi l'un des endroit qu'elle fréquentait. En temps ordinaire, j'aurais peut-être peu apprécié que quelqu'un se réfugie au seul endroit qui me permettait de me calmer.

Puis, sans que je puisse faire quoi que ce soit, elle se retourna et m'embrassa. Mon saisissement passé, je me surpris à lui rendre l'attention, comme on le dit. Moi qui n'avait jamais cru en l'amour... Je sentais mon coeur battre comme un malade, comme s'il voulait s'arracher à ma poitrine et s'envoler loin, loin, très loin...

Elle se blottit contre moi, et je l'enserrai tendrement. Doucement. Comme si elle avait été de la plus fine des porcelaines et que j'eus peur de la briser en mille éclats. Je penchai la tête vers son oreille.

Hailey... tu... me plais... beaucoup.

Ces mots me brulèrent la gorge, accélérèrent encore les battements de mon coeur, m'enivrant l'esprit de la plus agréable des tortures...
Puis, taquin, sans aucune méchanceté aucune, une phrase s'échappa de mes lèvres.

Va-t-il falloir que je demande à quelqu'un la permission de vous courtiser, belle dame ravisseuse de coeurs ?

Elle ne répondit pas. mais... au fond... était-ce vraiment nécessaire ? Non. Non, je ne pense pas. C'était inutile. Ces trois mots que les gens se disent mutuellement, nous n'en avions pas besoin. Et puis, le "t' " ôte à l'autre sa dimension humaine, en le réduisant à un "objet", bien qu'objet ne sois pas toujours péjoratif... Elle m'embrassa, et puis, avec cette fougue propre aux enfants, elle s'éloigna, dansa, rit... et chanta.

C'était tout simplement... maginifque. Même si je n'étais pas un grand fan du Moulin Rouge, c'était... scotchant. Moi, c'était de toutes autres paroles que j'avais dans la tête. Je n'aimais pas trop chanter, mais on m'avait souvent dit que j'avais une belle voix. Ce que j'avais dans la tête, c'était un de ce que je considérais comme était des "classiques". Wonderwall d'Oasis.

And all the roads we have to walk are winding
And all the lights that lead us there are blinding
There are many things that I would
Like to say to you
But I don't know how

A la fin du couplet, je me rapprochais un peu plus d'Hailey, les yeux brillant d'une lueur nouvelle, et continuai mon chant.

because maybe
You're gonna be the one that saves me
And after all
You're my wonderwall

Je me penchai doucement vers elle et kidnappai avec douceur ses lèvres.

Elle frissonna. Je le serrai un peu plus contre moi, lui transmettant un peu de ma chaleur. C'était nouveau pour moi, mais pas franchement désagréable. Même si c'était plutôt contre nature pour moi. Démon & Amour... Drôle de situation...

D'autant plus que je ne connaissais pas grand chose d'Hailey. Tout comme elle ne connaissait pas grand chose de moi. Bien qu'il n'y ait pas grand chose à savoir. EN fait, ça m'importait peu. Ce qui m'importait, là, était l'instant présent. J'aimais sentir son corps contre le mien, l'odeur de ses cheveux, de sa peau. Tout simplement elle. ELle m'avait ... ensorcelé.

Je la pris par la main et la conduisit à l'abri du froid.

Parle moi un peu de toi, si tu veux.

Elle me répondit de façon plutôt concise, mais je m'en moquai assez. J'étais plus préoccupé par elle en fait. Je reculais légèrement et mon talon s'enfonça dans un petit trou dans le toit. Je perdis l'équilibre et nous nous retrouvâmes par terre. Hailey juste au dessus de moi.

Oups...

Elle éclata à nouveau de son magnifique rire.

J'ai grandi à Cardiff au Pays de Galles, et j'ai passé la plupart de mon temps à faire criser ma famille et jour de la musique. Et je suis ici pour les mêmes raisons que toi.

Je lui souris, avant de me redresser en position assise, elle toujours sur moi, et de l'embrasser.

Elle échangea nos écharpes. Elle avait son odeur, ce parfum qui m'enivrais aussi efficacement qu'une bouteille de whisky enivre un alcoolique. EN milles fois plus agréable.

Tu me protégera contre Math? J'ai peur de sa réaction...

Elle se blottit contre moi, sa tête posée sur mon épaule, comme si elle dormait.

Je te protègerais de l'univers entier s'il le fallait. Ne t'inquiète pas.

Math ne me faisait pas peur. Et de toutes façons, je ne le laisserais jamais ne serait-ce que tenter de faire du mal à Hailey. Même si je n'étais pas vraiment du genre violent. Je posai ma tête contre celle d'Hailey.

Ce serait plutôt à lui d'avoir peur de ma réaction, si jamais il essaie de te faire du mal.

Elle avait dit "je t'aime." C'est bizarre : d'habitude, ce genre d'éffusion sentimentale me hérissait, mais là, j'avais le coeur qui se prenait pour une grosse caisse, genre "je vais finir par t'exploser dans les oreilles"...
Elle m'avait sauté dessus, avec autant de charme et de grâce qu'une lionne plongeant sur sa proie... sauf que là, c'était moi la proie.

Et toi...Tu m'aime?

Je faillis rire face à la candeur avec laquelle elle avait posé cette question.

Je t'aime à un point inimaginable...

Je me sentais un peu pitoyable là. Un démon qui tombe amoureux... Heavy se foutrait pas mal de ma tronche. Je plongeai mon regard dans celui de mon aimée.

Je détestai devoir passer mon temps enfermé, ici à croupir, alors que l'extérieur, le grand air m'appelait. Mais j'avais promis à ma mère que j'utiliserai toujours mon intelligence. Voilà comment on se retrouve coincé entre quatre murs à résoudre des équations débiles.

Heureusement, il y a des heures ou on n'a pas cours. Et là, en l'occurrence, je n'avais pas cours. J'avais plus ou moins décidé de flaner, les devoirs, je les faisais à l'instant I moins un nombre infiniment petit de temps. Mais bizarrement, quelque chose m'avait attiré vers le toit. Un endroit tranquille, parfais pour les couples, ou pour faire des plans foireux.

J'étais donc monté, monté les escaliers. normal pour qui veut aller sur un toit. Sauf que finalement, une fois la porte ouverte, j'eus préféré ne jamais être monté.

Elle était dans les bras de ce type, celui qui cherchait toujours comment foutre la zizanie. Comment pouvait-elle me préférer ce bellâtre ? Qu'avait-il de plus que moi ? Pourquoi lui ? Pourtant j'étais sûr qu'elle m'aimait. Alors, pourquoi me trahir ainsi ?

Math, je t'en supplie, écoute moi !!

J'avais serré les poings, elle s'était cachée derrière ce type en lui prenant la main. J'étais vraiment hors de moi. Elle ne valait finalement pas mieux que ces pathétiques humains. Et dire que je m'y étais attaché. C'est maintenant que le le réalisait.

Écouter quoi ? Je croyais qu'on était ensemble mais visiblement, je ne suis pas assez bien pour madame !

J'avais crié.

Hailey se détacha subitement de moi, avec la peur inscrite sur son visage. Mais elle prit ma main, comme pour se rassurer. Je me retournais.
Oh purée...
Math venait de débarquer sans aucun doute possible. Il avait l'air plus qu'en pétard, en même temps, je le comprenais. Je me sentais un peu coupable aussi... Je lui avais "volé sa petite amie"...

Math, je t'en supplie, écoute moi !!

Je sentais ça peur. Elle attisait et enivrait le démon en moi. Je m'en réjouissais d'une manière écœurante. Math serra les poings, et ses yeux lançaient des éclairs. Je le sentais mal là.

Écouter quoi ? Je croyais qu'on était ensemble mais visiblement, je ne suis pas assez bien pour madame !

Ouille, rien qu'à son ton, je sentis que ça se terminerait mal. Non pas que je sois défaitiste, juste que c'est dans ces situations que sois l'on agit avec raison, soit on laisse libre court à sa fureur, et lui était bien parti pour la seconde option.

Hey ! Ne lui parle pas sur ce ton ! Peut-être que si t'avais été plus attentionné envers elle, on en serait pas là !

Je me mordis les lèvres, c'était pas forcément la bonne chose à dire. Un courant de tension me parcourut.

Je ne sais pas ce qui m'agaçait le plus. Qu'il me tienne tête comme ça, ou qu'elle le défende, en prime, en me jetant la vérité à la figure.

Et alors ? Là, toi aussi tu me trompes, non ?

Pas terrible comme argument. Non, ce qui me foutait les boules, c'était qu'elle me préfère un gars comme ça ! Il n'avait aucun style, et même l'air plutôt crétin dans son uniforme, comme s'il n'était pas à sa taille...

J'analysai pendant une fraction de seconde le sentiment qui semblait m'habiter. Était-ce de la jalousie ? Non, c'était impossible. Comment pouvais-je être jaloux d'un gars comme lui ? Peut-être parce que ma petite amie préférait se jeter dans ses bras plutôt que dans les miens. De toutes façons, c'était pas vraiment sérieux, avec l'autre fille... Comme si on avait pas le droit de s'égarer un peu.

Écoute Hailey, je suis désolé... Je pensais pas te vexer...
Surtout, je pensais pas que tu me verrais.
J'ai fait une erreur, ça arrive a n'importe qui, non ?

J'avais du mal à cerner Math. Déjà, il ne m'inspirait pas confiance. Il avait l'air trop sûr de lui, trop prétentieux. Le genre de gars qui plait à Heavy en général. Je devrait peut-être lui dire d'aller la voir...
Le moment n'était pas aux démoneries de bas étage.

Comment pouvait-il dire quelque chose d'aussi dégueulasse ? Ce fut a mon tour de grincer des dents et de serrer les poings. Surtout quand j'entendis Hailey pleurer. Je toisais Math d'un regard dur.

T'as vraiment du culot de venir lui dire ça. T'appelles ça une erreur ? Moi j'appelle ça jouer sur les sentiments des gens. Et c'est vraiment pitoyable, mec.

Bon, d'accord, là j'omettais volontairement le fait qu'étant un démon, je jouais aussi avec les gens, mais pas de cette façon. Il s'approcha de nous, la main tendue comme pour saisir celle d'Hailey. Brisant l'étreinte de cette dernière, je me décallais et attrapai le bras de Math d'une main avant de l'attirer près de moi et de le saisir par le col de son uniforme.

Fous lui la paix. Elle t'a dit que c'était fini. T'as fait le con, maintenant, assume et DÉGAGES !

Keith par-ci, Keith par-là ! Mais qu'est-ce qu'il avait de plus que moi ce type ?!
Merde j'avais fait pleurer Hailey.

Mais je t'aime Hailey.

Voilà, c'était dit. J'avais longtemps refoulé ça, pensant que c'était juste l'attirance amusée du départ, de voir une gamine s'enticher de moi. ALors qu'au départ, c'est vrai je m'en foutais pas mal, et puis au fil du temps, je m'étais attaché à elle, a ses yeux bleus, et son sourire.

Je voulus m'avancer, la prendre dans mes bras et m'excuser. Oui, j'ai bien dit m'excuser. Mais Keith s'interposa, façon "gentleman protecteur".

Fous lui la paix. Elle t'a dit que c'était fini. T'as fait le con, maintenant, assume et DÉGAGES !

Comment osait-il me parler comme ça ? D'accord je l'avais un peu mérité. Mais je n'aimais pas le ton qu'il employait avec moi. Il s'était interposé en saisissant mon bras et le haut de mon uniforme. Je savais qu'il faisait des arts martiaux, mais il ne me faisait pas peur. Je le toisai. Son regard marron était déterminé. Déterminé à quoi ?

Lâche-moi Keith.

Il ne broncha pas. Dommage pour lui, parce qu'il commençait à sérieusement me gonfler. Je serrai mon autre poing avant de le lui balancer dans la figure. SOus le coup, il me lâcha.

Je t'avais dit de me lâcher.

Ma voix était glaciale.

Je n'avais pas voulu lâcher Math, parce que je ne voulais pas qu'il fasse de mal à Hailey. Résultat, je m'étais pris son poing dans la figure. Son crochet était... douloureux. Je reculais légèrement en portant la main à ma pommette. La vache ! Il m'avait pas raté !

Hailey lui cria d'arrêter alors qu'il levait à nouveau le poing. Étrangement, il obéit. Ma pommette me faisait un mal de chien. Mais je restais entre eux deux, un air déterminé sur le visage.

Math ça suffit!! Je suis amoureuse de Keith. Je l'aime LUI. Toi, c'est finis. Fiche moi la paix, ne me parle plus, ne m'approche plus. Je ne veux plus te voir. Jamais.

Son visage se décomposa. J'avais une furieuse envie de lui rendre son coup, mais je me retins, inutile d'agraver la situation.

Math, il vaudrait mieux que tu partes. Si tu as un tant soit peu d'affection pour Hailey, tu comprendras que la faire souffrir d'avantage ne servirait à rien.

J'avais parlé d'une voix basse mais audible. Nulle menace, mais s'il fallait user de force, j'étais prêt. Je comprenais tout de même ce qu'il ressentait.